Pollution lumineuse : faut-il maintenir l'éclairage public pendant le confinement ?
La France vit au rythme du confinement depuis près d'un mois maintenant et pourtant, les grandes villes demeurent éclairées la nuit par les devantures des magasins. Si pour certaines communes cela serait utile pour garantir la sécurité des citoyens, pour d'autres et certaines associations, cela relèverait de la pollution lumineuse.
L'éclairage public nocturne pour assurer la sécurité des citoyens
En cette période de confinement, il est raisonnable de se demander s'il est réellement utile de maintenir les éclairages publics allumés car même si la pollution de l'air dans les villes baisse, la nuisance lumineuse elle, persite.
Les avis divergent sur la question, les grandes villes ne semblent pas vouloir réduire les éclairages pendant la durée du confinement. C'est le cas de la ville de Lille qui souhaite "limiter le côté sombre" en utilisant l'argument sécuritaire. A l'inverse, plusieurs communes ont elles pris la décision de plonger leurs rues dans le noir. Ainsi, la ville d'Orsay en Essonne, Ile-de-France, a décidé de couper l'éclairage public dans les rues de 23h à 5h du matin, ne laissant ainsi allumés que les hôpitaux et les gares de RER.
Y aurait t-il donc un lien entre éclairage public et sécurité ? C'est en tout cas une question qu'il est légitime de se poser lorsque l'on sait que 87% des Français considèrent l'éclairage public comme "un enjeu central de sécurité".
Si par ailleurs 90% des administrés souhaitent que les bureaux inoccupés la nuit soient éteints, le sentiment d'insécurité n'en reste pas moins largement partagé par les piétons, qui sont rassurés d'avoir une source de lumière autre que celle des lampadaires. Dans les faits, l'éclairage public contribuerait à assurer le bon cheminement et une visibilité suffisante aux piétons et aux cyclistes, l'angle d'éclairage des phares de voitures ne permettant pas aux automobilistes de détecter la présence d'une personne sur un passage piéton.
L'éclairage public serait également utile sur les routes communales et départementales car il permettrait de lutter contre les incivilités et le vandalisme, mais à ce jour, il n'existe aucune étude qui pourrait corréler l'absence d'éclairage à l'évolution d'actes de vandalisme ou d'infractions. C'est pourquoi des textes ont été rédigés pour réglementer les usages de l'éclairage public. Le 29 mars 2018, l'Etat était condamné par le Conseil d'Etat à mettre l'éclairage public en veilleuse pour lutter contre la pollution lumineuse.
La pollution lumineuse, un fléau omniprésent aux conséquences multiples
Aujourd'hui dans le monde, environ 8 personnes sur 10 vivent sous un ciel nocturne pollué par la lumière artificielle. Un chiffre alarmant qui est lourd de conséquences autant pour l'être humain que pour la faune et la flore.
Mais qu'appelle-t-on pollution lumineuse ? Cette expression désigne la lumière artificielle qui dégrade les cycles de la lumière naturelle en modifiant l'illumination de l'environnement. Elle vient ainsi impacter les comportements, les rythmes biologiques et les fonctions physiologiques des organismes vivants et des écosystèmes. On parle aussi de "pollution lumineuse écologique".
D'un point de vue sanitaire, l'éclairage public peut causer des troubles du sommeil, ce qui peut s'avérer être dangereux sur la durée. La pollution lumineuse a également un impact sur la biodiversité. L'association de protection des animaux 30 millions d'Amis, relatait que les oiseaux, les amphibiens et même les poissons souffraient de la lumière artificielle qui illumine les villes et les campagnes. Le phénomène modifie les comportements de certaines espèces dont le cycle de vie, de reproduction ou de migration s'appuie essentiellement sur l'alternance du jour et de la nuit. La pollution lumineuse aurait enfin des conséquences néfastes sur l'environnement. En plus de nous priver d'un ciel étoilé, elle représente un gaspillage énergétique considérable.
L'Association Nationale pour la Protection du Ciel et de l'Environnement Nocturnes (ANPCEN), explique que "la pollution lumineuse ne se limite pas seulement à l'aspect énergétique et qu'il ne faut pas uniquement limiter l'éclairage pour le limiter, mais plutôt avoir une approche globale en se posant les bonnes questions à savoir où on éclaire et pourquoi on éclaire".
Plusieurs initiatives ont vu le jour pour lutter contre ce phénomène à l'instar de "Villes et villages étoilés", lancée par l'ANPCEN qui agit depuis 20 ans pour essayer de limiter voire réduire l'éclairage nocturne, ou encore la "Journée de la nuit" qui cette année, aura lieu le 10 octobre.