Le compost humain : mourir et transformer son corps en terreau fertile

Publié le 28 octobre 2021 (modifié le 20 février 2023 à 22h22)
Par Anne-Sophie de Monès
Temps de lecture : 3 mins
Les rites funéraires ont un coût : économique et écologique. Les alternatives légales à l’inhumation ou à l’incinération sont aujourd’hui inexistantes, à part dans certains états des États-Unis où l’on peut pratiquer le compostage humain. Cette dernière pratique, appelée aussi réduction organique naturelle, réduction biologique ou encore humusation (processus de transformation du corps grâce aux micro-organismes présents dans la terre), est pourtant très écologique. Nous avons interviewé Francis Busigny, fondateur de l’association belge Humusation sur ce processus favorable à l'environnement.

L’humusation, c'est rendre à la terre ce qu’elle nous a donné : la vie 

L'humusation est un procédé qui consiste à contrôler la transformation d’un corps (humain ou animal) par micro-organismes (présents uniquement dans les premiers centimètres du sol) dans un compost composé de broyats, de bois d’élagage, de paille, de feuilles mortes… 

Le corps, qui doit être vierge de soin de conservation, se décompose naturellement. Cette lente décomposition du corps génère une importante chaleur (entre 60 et 70 degrés) qui écarte les potentiels animaux sauvages, tue les germes pathogènes et évite les mauvaises odeurs. « Les conditions sont donc réunies pour que tout se passe bien ! » indique Francis Busigny de l'association belge Humusation. Entre neuf et douze mois plus tard, le corps est totalement décomposé. S’est formé alors un terreau très abondant qui pourrait être utilisé pour fertiliser jusqu’à une centaine d’arbres.

Francis nous explique combien le corps humain est finalement, vivant et non, source de fertilité. Les 40 tonnes de déjections rejetées en moyenne durant toute une vie pourraient être transformées en matière précieuse pour la terre. « Le caca, c’est de la merde uniquement si on tire la chasse d’eau, sinon c’est de l’or brun ! » affirme-t-il.  

 

Le compost humain légalisé dans certains états américains 

Afin d’être transformé en terreau fertile et pour que le processus de décomposition soit optimum, le corps doit être en contact direct avec la terre ou dans un linceul biodégradable, il ne doit pas être dans un cercueil. La présence d’un cercueil étant obligatoire en France, l’humusation y est illégale.

Aux États-Unis en revanche, certains états comme Washington -depuis 2019- et l’Oregon -depuis l’été 2021- légalisent la réduction biologique. Plusieurs sociétés de compost humain proposent ce service. Contrairement aux longs processus préconisés par Francis via l’humusation, ces sociétés américaines accélèrent le processus naturel de décomposition du corps. Ce dernier est placé dans un conteneur avec de la paille, des copeaux de bois de la luzerne pour y créer les conditions idéales d'humidité et d'oxygénation afin que les bactéries réalisent leur travail. Au bout de trente jours environ, le matériau obtenu est un humus très fertile. Il peut être donné aux familles pour fertiliser un jardin ou un arbre planté en mémoire du défunt.

La société Recompose propose ce service à partir de 5 500 dollars (environ 4 750 euros).  La start-up accepte les défunts d’autres états américains et gère avec la société des pompes funèbres, le transport du corps. En revanche, nous ne savons pas en revanche s’il est possible pour un Français d’envoyer un corps aux États-Unis.

 

Comment exprimer sa volonté de transformer son corps en compost ?

Aujourd’hui donc, il n’est pas possible en France d’avoir recours à la réduction organique naturelle. Si cette alternative écologique à l’inhumation ou à l’incinération vous séduit, vous pouvez l’exprimer via un acte de dernière volonté en faveur de l’humusation aux autorités de votre commune.

Vous pouvez également soutenir l'association Humusation via un don et ainsi participer à la création du premier centre pilote pour l’humusation. Autre option, signer la pétition en faveur de la métamorphose des défunts en humus.

Quel que soit son ressenti face à cette pratique funéraire, force est de constater que la réduction organique permettrait d’économiser beaucoup d’énergie (l’incinération est très consommatrice d’énergie pour brûler le corps composé en majorité d’eau) et éviterait une pollution des sols (les nappes phréatiques aux abords des cimetières sont souvent contaminées). Francis Busigny conclut : « En interdisant l’humusation, nous nous privons d’une matière organique disponible très fertile et d'un processus 100 % favorable à l’environnement ».

 

Envie de recevoir de bonnes ondes ?

Inscrivez-vous à notre newsletter et recevez chaque semaine de nouvelles façons d'agir à votre echelle !