Ils créent des espaces aménagés dans leurs bureaux pour héberger des personnes en précarité le soir et le week-end

Remplis d'animation et de vie en journée et en semaine, des bureaux vides et inoccupés le soir et le week-end sont transformés en hébergements d’urgence pour accueillir des personnes en grande précarité. Cette brillante idée, c’est celle de Pierre-Yves Loaëc, dirigeant de l’agence de communication Nobilito à Nantes, membre du Centre des Jeunes Dirigeants de Nantes et fondateur des Bureaux du Cœur. Il nous en dit plus sur cette incroyable aventure humaine.

Un environnement favorable à la réinsertion sociale

Au printemps 2018, après plusieurs constats désolants, Pierre-Yves Loaëc réunit une dizaine de dirigeants, membres comme lui, du Centre des Jeunes Dirigeants de Nantes, un think-tank réunissant entre autres des entrepreneur(e)s mais surtout toutes celles et ceux qui ambitionnent de construire des entreprises plus inclusives et plus durables. Il évoque alors l’idée d’ouvrir les locaux des entreprises la nuit et le week-end, à des personnes en situation de précarité, afin de faciliter leur réinsertion sociale. En novembre 2019, Elisabeth, une jeune femme, est la toute première invitée des Bureaux du Coeur, au sein de l’entreprise ACM Ingénierie.

Convaincus que l’intimité et le calme sont des facteurs propices à la réinsertion sociale, Les Bureaux du Coeur mettent à disposition de leur invité(e) un espace muni principalement d’un coin lit, de sanitaires et d’une kitchenette. « On a mis en place une porte coulissante à un endroit précis de nos locaux : d’un côté de la porte, il y a nos bureaux et nos ordinateurs et de l’autre côté, un coin lit avec nos sanitaires et une kitchenette. Ça fait un espace de 45m2 dans lequel on crée un hébergement très digne. [...] On lui offre une intimité qui lui donne envie de retrouver une vie “normale” » explique le dirigeant de Nobilito.

Les Bureaux du Coeur, une aventure humaine unique

Pour mener à bien leur mission, les Bureaux du Cœur ont mis en place une organisation tripartite entre l’entreprise hôte, l’invité(e) et l’association partenaire. En effet, une fois l’espace d’accueil prêt, l’entreprise hôte est mise en relation avec une personne “proche de la réinsertion” -l’invité(e)-. Celle-ci est accompagnée et encadrée par une association qui vient en aide aux personnes en situation de précarité. L'association veille également au bon déroulement du séjour de l’invité(e) au sein de l’entreprise et assure un suivi régulier. 

Bien plus que de proposer de simples locaux vacants, Les Bureaux du Cœur ont réellement pour vocation de créer du lien social et d’accompagner la personne accueillie vers une réinsertion sociale complète. « Le but n’est pas de recréer des hébergements collectifs dans les locaux, il y a de la rencontre, du lien social » appuie Pierre-Yves. Les collaborateur(trice)s sont de leur côté très enthousiastes et sont ravi(e)s de partager un café le matin, certain(e)s n'hésitent pas à proposer leur aide pour refaire un CV, à dépanner d’un téléphone… « C’est vraiment très simple, ça ne demande pas d’efforts. Ça ne demande pas plus d’efforts que de dire bonjour à un collègue », confie-t-il. Ainsi, pendant une période de 6 mois renouvelable, l’invité(e) bénéficie d’une période de répit lui permettant de se recentrer sur lui/elle et de participer aux ateliers dispensés par l’association partenaire autour de la réinsertion professionnelle.

Petites et grandes entreprises séduites par l’initiative

Depuis son lancement, l’initiative des Bureaux du Coeur a séduit de nombreuses entreprises -des petites comme des grandes- qui ont manifesté leur intérêt pour le projet. Les Bureaux du Cœur réfléchissent, en collaboration avec elles, au réaménagement de leurs locaux de sorte qu’ils puissent y accueillir une personne dans le besoin de manière plus pérenne. « Lors de la construction d’un bâtiment, on se dit : “Une partie des espaces peut être utilisée pour faire de l’hébergement d’urgence de manière très simple sans qu’on ait à reconfigurer complètement l’espace” » explique Pierre-Yves.

Cinq associations sont aujourd'hui partenaires de cette belle initiative, dont l’association Saint-Benoît Labre engagée auprès des plus démunis, qui fut la toute première à adhérer au projet. À cela, s'ajoutent une quinzaine de Bureaux du Coeur et une centaine de demandes actuelles en cours de traitement. « Il y a quelque chose qui est en train de prendre qui est national » se réjouit Pierre-Yves. Au total, ce sont 7 invité(e)s qui ont pu sortir de la précarité grâce à ce moment de répit réunissant calme, sérénité, sécurité et lien social.

D’ici l’été 2021, Les Bureaux du Coeur ambitionnent de se déployer dans quatre autres villes, à commencer par Paris et Lyon. 

Mélanie Appadoo