Agricultrice résistante, Sarah va planter 4.000 arbres pour sauver sa ferme bio

Publié le 26 janvier 2017 (modifié le 20 février 2023 à 22h15)
Par Fermes d'Avenir 2017
Temps de lecture : 4 mins

Planter 4.000 arbres, tel est l'incroyable chantier que Sarah Le Coq a lancé pour éviter l'expropriation de sa ferme bio, la Ferme du Beauvoyer en Ile-de-France. Alors que son projet vient de remporter un prix spécial au concours Arbres d'Avenir, organisé par Fermes d'Avenir, la jeune femme nous parle de son projet fou et de son combat pour une agriculture plus écologique.

Sarah Le Coq est menue, toujours souriante ! Mais attention aux apparences, cette jeune femme a de la poigne et beaucoup de courage. Preuve en est : elle s'est lancé le défi de planter 4.200 arbres sur sa ferme, en plus de la zone de maraichage bio déjà existante. Objectif : résister à l'urbanisation galopante qui menace la ferme familiale, à Rosny-sur-Seine, en Ile-de-France.

Un projet admirable qui vous a d'ailleurs conquis. Vous lui avez le prix attribué le prix "Graine d'agriculteur", dans le cadre du concours "Arbres d'Avenir". Cette compétition nationale, lancée par l'association Fermes d'Avenir, a récompensé 34 agriculteurs ayant pour projet d'intégrer les arbres au cœur de leurs pratiques. Une initiative bienvenue alors que ces derniers disparaissent de nos paysages.

Les lauréats ont reçu leur prix mardi 24 janvier, lors d'une cérémonie organisée au ministère de l’Agriculture, en présence du ministre Stéphane Le Foll, de l'écologiste Nicolas Hulot et de Maxime de Rostolan, fondateur de Fermes d’Avenir. C'est à cette occasion que nous avons rencontré Sarah Le Coq. Elle nous a parlé de son projet fou, des bienfaits de l'arbre et des solutions pour voir émerger une agriculture plus respectueuse des hommes et de la terre.

One Heart : Pourquoi avez-vous décidé de planter autant d'arbres ?

Sarah Le Coq : Pour éviter que mon père se fasse spoiler ses terres. J'étais fleuriste auparavant. Mais il y a cinq ans, la ferme familiale a été menacée d'expropriation par une OIN, une opération d’intérêt nationale qui vise à urbaniser les versants de la Seine. J'ai donc décidé de m'associer à mon père et de planter des arbres. Dans l’imagerie collective, les arbres ancrent un paysage. Donc si vous les arrachez pendant que vous expropriez un agriculteur. Tout de suite, c’est beaucoup moins politiquement correct. Je veux rappeler que quand vous expropriez un agriculteur, c'est trente ans de travail que vous rayez, le travail de toute une vie. 

Autre bonne raison de planter des arbres : ils permettent de ramener la nature dans les champs.

Quel est l'intérêt pour vous ?

Les arbres vont recréer tout un écosystème. Ils vont faire revenir la flore, les animaux, les insectes...C'est indispendable pour nous qui cultivons en bio. Nous n'utilisons pas de pesticides. Il faut donc bien que les bêtes se mangent entre elles.

Je vais vous raconter une histoire, l'histoire de la pie grièche, un tout petit oiseau de 30 grammes. Pour se nourrir, cette pie a besoin d’un épineux car elle va embrocher tous ses insectes sur une épine. Et quand une épine est complète, elle va l'apporter à ses petits pour qu'ils mangent les insectes. Conclusion : s’il n’y a pas d’arbres à épines, la pie grièche ne vient pas. Un tout petit changement peut recréer tout un écosystème.

Quels sont les autres bienfaits de l'arbre ?

Il y en a beaucoup. 

  • Il va amener de l’ombre. Grâce à lui, il ne fera ni trop chaud ni trop froid. Les légumes vont être heureux. 
  • L'arbre a un système racinaire impressionnant, de trois fois sa taille. Ce qui permet de retenir l'eau dans les sols et de les stabiliser.
  • L'arbre absorbe les mauvaises molécules et les retraitent pour redonner de l’oxygène et de la matière organique assimilable par les plantes.

Vous avez remporté le prix "Graine d'agriculteur". Que va-t-il vous apporter ?

10 000 € ! Une belle somme pour faire avancer le projet. Sa réalisation devait s'étaler sur 20 ans, mais grâce à Fermes d’Avenir, on va pouvoir le terminer d'ici deux ans. Une première session de plantation a eu lieu en décembre : 2.500 arbres en trois jours avec l'aide de bénévoles. Ils ont répondu à notre appel lancé sur Facebook. Il reste 2.000 arbres à planter pour arriver à un total de 4.200 arbres sur 17 hectares.

Quel type d'arbres allez-vous planter ?

Pour les choisir, on a d'abord répertorié les essences présentes sur notre territoire : chêne, aulnes, accacia, cassis, noisetier, noyer, etc. Hors de question d'importer des espèces du sud de la France. On va planter des variétés complémentaires : 

  • Des haies le long des chemins avec de fruits à baies et à coque. Nous voulons encourager les gens à sortir de chez eux et à venir glaner des fruits gratuitement. 
  • Des haies qui serviront à protéger les légumes du vent.
  • Des espèces plus productives pour nourrir les oiseaux : du sureau, de l'argousier, etc. 

Comment voyez-vous l’avenir de l’agriculture bio ?

Je souhaite l’autosuffisance des villes et villages. Voir plus de jeunes s'installer. Le modèle agricole des années 70-90 n’est plus viable, tout le monde le sait. Il faut donc mélanger les savoir-faire, les synergies positives et faire du local. Je veux une agriculture respectueuse du vivant et de l’environnement.

Comment y parvenir ?

Ça passe par la formation, l’éducation des enfants, la sensibilisation du public. Mais pas la sensibilisation via la télé, mais par l'humain. Il faut ouvrir les fermes, supprimer les intermédiaires. Et surtout, il faut croire en ses projets, même les plus fous. Une phrase dit : "Plus grands sont les projets, moins on les perd des yeux." Il y a aussi : "Ce qu'il y a de bien avec les fêlés, c’est qu’ils laissent passer la lumière."

Comment se porte votre ferme ?

Nous cultivons 80 espèces de légumes et fruits par an, et les proposons en vente direct. Nous sommes contents, nous gagnons 10 à 20 % de clientèle par an pour la vente. 

L'agriculture diminue fortement en Ile-de-France. Vous êtes donc une résistante ?

Oui, je suis un résistante. Dans ma région, qui représente 2.000 hectares, nous étions 60 maraîchers dans les années 1940, nous sommes plus que trois aujourd'hui. À cause notamment de l'expropriation, du prix du foncier en Ile-de-France, etc. Je veux rester en Ile-de-France. Il y a un bassin de consommation, une véritable demande. Et quand je vois les particules fines à paris, je n'ai qu’une envie, c’est planter des arbres (rire).

Le projet de Sarah vous plaît ? Vous pouvez aider la jeune femme à péréniser sa ferme via Blue Bees, la plateforme de financement participatif créée par Fermes d'Avenir : https://bluebees.fr/fr/project/297-ferme-du-beauvoyer

Pour découvrir tous les lauréats du concours "Arbres d'avenir", c'est par ici : https://bluebees.fr/fr/arbresdavenir2016

L'association

Fermes d'Avenir 2017

Fermes d'Avenir 2017

La problématique



La solution



Les actions


Nous souhaitons donner au plus grand nombre l’envie et les moyens de lancer leur propre projet agricole, écologique et rentable.
Notre démarche touchera en particulier les agriculteurs souhaitant effectuer leur transition, les citadins souhaitant lancer une activité de maraîchage, et les propriétaires fonciers soucieux de valoriser une partie de leurs terres…

L’objectif principal est de montrer qu’il est possible, sur un hectare, de créer un emploi pérenne en maraîchage biologique.

Dans un premier temps, notre défi est donc de créer une microferme exemplaire, en maraîchage, s’inspirant de la permaculture et de l’ensemble des techniques efficaces de l’agro-écologie.
Cette expérimentation nous permettra de réaliser une boîte à outils, en ligne, véritable source d’informations pour reproduire une telle ferme. La France a perdu 1,5 millions de fermes en 50 ans, il nous semble tout à fait réaliste d’imaginer en re-créer 200.000 dans les 20 ans qui viennent, créant ainsi des emplois redynamisant les territoires, et répondant à un réel besoin de la population : se nourrir, bien.

Le second objectif est de sensibiliser et d’informer, de former des maraîchers.
Pour sensibiliser, nous créerons une grille d’indicateurs, économiques, écologiques, sanitaires et sociaux. Ils permettront d’avoir une lecture rapide et précise des impacts que peut avoir le choix de tel ou tel mode d’agriculture.

Le troisième objectif, plus ambitieux et à long terme, est de construire, avec les politiques publiques nationales et territoriales, un nouveau modèle, au centre duquel se retrouveraient, en symbiose, l’humain et la nature, mais sans oublier les réalités économiques et sociétales.
Dès à présent, nous réunissons autour de ce projet de nombreux représentants des institutions, et travaillons notamment avec plusieurs Ministères dont les centres d’intérêt rejoignent les nôtres : l’agriculture, l’écologie, la santé, l’éducation, mais aussi l’emploi et le budget.


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