Réchauffement climatique : les plages mauriciennes menacées de disparaître dans 50 ans

Publié le 5 mai 2022 (modifié le 20 février 2023 à 22h22)
Par Mélanie APPADOO
Temps de lecture : 3 mins
Réputée pour ses plages paradisiaques, l’île Maurice subit de plein fouet les conséquences du réchauffement climatique. En effet, les plages victimes d’érosion, ne cessent de reculer, ce qui inquiète les scientifiques mauriciens. À ce rythme-là, elles pourraient même disparaître du paysage d’ici une cinquantaine d’années. Pour Vassen Kauppaymuthoo, ingénieur en environnement, océanographe et diplômé en droit, il existe des "solutions basées sur la nature" qui pourraient être mises en œuvre afin de limiter ce phénomène. Avec optimisme, il nous en liste quelques-unes.
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Les coraux, une protection contre l’érosion des côtes

C’est bien à eux que l’on doit les longues étendues de plages de sable fin. En effet, lorsqu’ils se dégradent et meurent, les coraux se désagrègent en petits grains de sable. Mais ce n’est pas leur fonction principale : les coraux servent surtout d’abri à tout un écosystème et protègent contre les risques d’érosion côtière et de tsunamis. « Les coraux cassent la force des vagues et empêchent donc l’énergie des vagues océaniques de venir abîmer nos plages » explique Vassen Kauppaymuthoo. 

Que se passe-t-il donc lorsqu’il n’y a plus de coraux ? L’ingénieur océanographe affirme que les coraux sont aujourd’hui fortement menacés à l’île Maurice. L’île, qui auparavant regorgeait de milliers de coraux colorés, ne compte désormais que 30 % de coraux en vie. Cette disparition est en grande partie due à un manque de gestion des eaux usées, à la pollution et aux activités humaines, détaille Vassen Kauppaymuthoo. Si les activités humaines sont majoritairement responsables de la disparition des coraux, il n’en demeure pas moins qu’ils sont également fragilisés par l’acidification des océans. En effet, lorsque le dioxyde de carbone présent dans l’atmosphère se dissout dans l’eau, il devient un gaz carbonique et réduit le PH de l’eau de mer, ce qui affecte énormément la structure des coraux. « C’est une catastrophe qui est visible » ajoute-t-il.

Ce phénomène n’est pas sans incidence pour 10 à 20 % de la population locale qui vit le long des côtes. Avec le niveau de la mer qui s’élève chaque année de 5,6 millimètres (soit le double du niveau mondial) et les plages qui ont reculé de 7 à 8 mètres, de nombreuses familles seront bientôt contraintes de fuir. Selon une étude de l’Organisation internationale sur les migrations, 60 000 insulaires devront être déplacés d’ici 2040. Face à cette urgence climatique, Vassen Kauppaymuthoo appelle à agir en communion avec la nature.

Des solutions basées sur la nature

Pour lutter contre l’érosion des plages, les Mauriciens ont d’abord eu l’idée de planter des filaos (arbres des régions tropicales) qui servent également de brise-vent. Au fil du temps, de nombreux dispositifs ont été ajoutés par le gouvernement pour renforcer cette protection. Des gabions, sortes de casiers rectangulaires contenant des roches, ont également été placés au fond des lagons et utilisés pour installer des murs de protection. Pour Vassen Kauppaymuthoo, il existe d’autres solutions naturelles et pérennes, si l’Homme prend le temps d’écouter la nature et d’agir avec elle. « La seule chose qui va pouvoir nous sortir de là, c’est notre environnement  : il faut prendre des solutions basées sur la nature », affirme-t-il. 

Afin de lutter efficacement contre l’érosion des côtes, l’ingénieur en environnement suggère plusieurs solutions qui, chacune à leur échelle, limitent le phénomène d’érosion. Il prend l’exemple des mangroves (écosystème côtier et humide que l'on retrouve dans les zones littorales et tropicales) dont la superficie a augmenté de 40 % entre 2009 et 2019 à l’île Maurice, qui pourraient non seulement empêcher l’érosion côtière mais aussi constituer un important puits de carbone. 

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Des palétuviers adaptés aux milieux marins. Crédits : M.A/One Heart

Il souligne également l’efficacité des récifs artificiels, ces « structures immergées volontairement afin de créer, protéger ou restaurer un écosystème riche et diversifié » (IFREMER, 2000). Selon Vassen Kauppaymuthoo, les boules de récifs (utiles pour la construction de récifs artificiels) « permettraient d’une part aux poissons de venir s’y réfugier tout en servant de substrat solide aux coraux qui viendraient s’y fixer et pousser » et d’autre part, de « casser la force des vagues et limiter l’érosion ». Selon le spécialiste, cet aménagement pourrait redonner une densité de 20 % à la plage.

Face à l’accélération du réchauffement climatique, Vassen Kauppaymuthoo déplore l’inaction climatique sans pour autant tomber dans le défaitisme : « Tant qu’on n’est pas au bord de la falaise sur le point de  tomber, on ne va pas réagir. Mais je suis très optimiste, il y aura un déclic. ».

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