Dordogne : un sanctuaire pour les renards ne pouvant plus vivre à l'état sauvage

Publié le 4 février 2022 (modifié le 20 février 2023 à 22h22)
Par Julie MARIE
Temps de lecture : 4 mins
Assistante vétérinaire de formation, Carine Gresse, fondatrice et présidente du Clos des Renardises, a pour projet d’ouvrir un refuge pédagogique pour les rescapés de la faune sauvage. Ici, les maîtres-mots seront éducation et sensibilisation centrées sur le renard, espèce encore trop souvent considérée comme nuisible en France.

Une alternative à l'euthanasie pour les renards inaptes à la vie sauvage

C’est à Douzillac en Dordogne qu’est en train de se concrétiser un étonnant projet porté par Le Clos des Renardises. Près de 2 000 m2 sont en cours de débroussaillage par des bénévoles de l’association afin d’accueillir dès l’été 2022, si tout se passe bien, les premiers renards du refuge. « Ni un centre de soin ni un parc animalier, ce sera un sanctuaire, un endroit où ils viendraient finir leurs jours dans de très bonnes conditions, adaptées à l’espèce mais aussi à l’individu », confie Carine.

Les renards seront admis au refuge à une seule condition : ils devront pour une raison ou une autre ne plus être en capacité de vivre à l'état sauvage. Certains ont gardé les séquelles d’un accident (amputation d’un membre, perte des canines, perte de la vue…), ce qui les empêche de chasser pour se nourrir. D’autres ont été recueillis pendant trop longtemps par des particuliers et sont maintenant trop « imprégnés » par l’Homme pour retourner dans la nature. « On veut vraiment donner une seconde chance à ceux qui ont choisi de vivre », insiste la fondatrice du Clos des Renardises après nous avoir expliqué que les renards, considérés en France comme nuisibles, sont malheureusement souvent euthanasiés après un passage en centre de soin.

Le renard, une espèce mal-aimée en France ?

En plus de la création d’un refuge, le Clos des Renardises aimerait développer une activité pédagogique pour sensibiliser le grand public au renard, espèce mal-aimée en France. Aujourd’hui, ils continuent d’être chassés et piégés, car toujours considérés comme les principaux porteurs de la rage. Pourtant, la rage a depuis disparu en France, comme dans la plupart des pays européens. Le renard est aussi peu apprécié car c’est un prédateur de petit gibier, ce qui fait de lui un adversaire pour les chasseurs. Enfin, son image de terreur des poulaillers continue de le desservir.

Le renard rend pourtant de grands services aux agriculteurs : d’après l’association Animal Cross qui agit pour la protection et la défense de tous les animaux, il lutte efficacement contre la multiplication des campagnols et autres ravageurs de culture et régule la faune en éliminant les individus malades ou inadaptés. Il joue aussi un grand rôle dans la dispersion de certaines plantes et autres arbres : il rejette par ses déjections des graines et noyaux qu'il a consommés et favorise ainsi l'apparition du merisier qui s'avère être une potentielle source de revenus pour le propriétaire du terrain. Pourtant, chaque année en France, ce sont 600 000 à un million de renards qui sont tués. Cela s'explique en partie par la chasse autorisée plus de dix mois sur douze, mais aussi par des techniques barbares encore pratiquées telles que le déterrage ou la chasse à courre. Ces méthodes de chasse consistent à poursuivre l'animal sauvage avec une meute de chiens jusqu'à ce qu'il soit capturé. Les chasseurs vont parfois même jusqu’à insérer des chiens dans les terriers pour "arracher" les malheureuses bêtes avant de les torturer et de les abattre à l’arme blanche, à coup de pelle ou de fusil.

« Il faut connaître pour comprendre, comprendre pour aimer et aimer pour protéger »

Pour Carine Gresse, passionnée par les renards, les méthodes de chasse citées plus haut sont inacceptables. En créant un sanctuaire pour les renards, elle espère faire bouger les lignes et leur enlever l’étiquette de "nuisibles". Pour informer le grand public sur le sort des renards, Le Clos des Renardises organise des conférences au sein des écoles, dans des festivals nature et des événements en collaboration avec d’autres associations afin de déconstruire les idées reçues sur les renards : « On est là pour aller au-devant des jugements. Lors des conférences, les gens apprennent à connaître l’espèce et en ressortent souvent avec une autre vision du renard qu’ils ne connaissaient souvent pas bien ». Pour autant, Carine ne ferme pas les yeux sur les actions de l'Homme sur l'environnement qui menacent chaque jour un peu plus l'habitat naturel de nombreuses espèces et les mettent en danger : « Il faut que chacun sache que ce ne sont pas les espèces prédatrices qui mettent en péril les animaux qui sont en train de disparaître mais c’est justement l’activité humaine et l'anthropisation de tous les espaces qui condamne de plus en plus ces pauvres animaux : on déboise, on construit, on fait avancer la ville, on obstrue des passages naturels de faune… ».

Moments de complicité entre un photographe et une renarde sauvage

Le sanctuaire imaginé par Carine et son équipe n’ambitionne pas d'ouvrir ses portes au grand public. Celui-ci pourra être observé à distance et visitable sous conditions car comme nous le rappelle la Carine, il ne s’agira pas d’un parc animalier. Pour nous aider à mieux comprendre les ambitions et aspirations du Clos des Renardises, la passionnée de faune sauvage nous cite le célèbre dicton du Docteur Fernand Méry qui reflète bien l’image de son association : « Il faut connaître pour comprendre, comprendre pour aimer et aimer pour protéger. »

« Il y a tellement de belles choses sur terre et je pense que chaque animal a sa place dans la nature » conclut-elle. En attendant l'ouverture du sanctuaire, vous pouvez soutenir le projet qui se veut évolutif et pérenne, en participant à la cagnotte disponible sur le site de HelloAsso

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