Découvrez comment un petit village italien a ouvert les bras à des milliers de migrants

Publié le 6 février 2017 (modifié le 20 février 2023 à 22h15)
Par One Heart
Temps de lecture : 3 mins

Parmi les sorties ciné de ce mercredi, nous vous conseillons chaudement le documentaire "Un Paese di Calabria". Il raconte la belle histoire de Riace, petit village du sud de l'Italie, qui a repris vie grâce à l’arrivée de migrants en 1998. Nous avons rencontré les réalisatrices de ce film passionnant et nécessaire, Shu Aiello et Catherine Catella​.

Comme tant d'autres bourgades victimes de l'exode rural, Riace, petit village de Calabre situé à l'extrême sud de l’Italie, mourrait à petit feu. Il voyait les maisons se vider de ses habitants, les commerces fermer. Mais en 1998, un bateau transportant 200 kurdes échoue sur ses plages. Domenico Lucano, aujourd’hui maire de la ville, décide d’accueillir les migrants en réhabilitant les maisons abandonnées. 

Depuis, le village a conservé cette culture de l’hospitalité et est considéré comme un modèle d'intégration. En 25 ans, Riace a accueilli 6 000 migrants et réfugiés. Aujourd'hui, il compte près de 2000 habitants et parmi eux, un quart sont des réfugiés provenant de divers pays : Afghanistan, Érythrée, Éthiopie, Nigéria ou encore Somalie. Pour le père de Domenico Lucano, "Riace est revenu à la vie".

C'est cette belle histoire que raconte Un Paese di Calabria. Sobre et instructif, le documentaire mêle habilement les souvenirs, parfois durs, des migrants, avec le quotidien tantôt paisible tantôt festif du village. Un scénario mis en valeur par la beauté des paysages du Sud de l'Italie. One Heart a rencontré Shu Aiello et Catherine Catella​, les réalisatrices de ce film plus que jamais nécessaire.

One Heart : Comment est née l’idée de Un Paese di Calabria ?

Shu Aiello : Rendons hommage à Daniel Mermet ! C’est en écoutant l’émission magnifique qui s’appellait Là bas si j’y suis, sur France Inter, que nous avons entendu parler de Riace. Même si nous avions déjà le projet de faire un film en Italie sur cette question de la migration.

En quoi ce village est-il un modèle d’intégration ? 

Catherine Catella​ : C’est un modèle parce que l'expérience est née d’une réaction spontanée d’hospitalité. Et en fait, l'expérience dure depuis vingt ans et va encore continuer.

C’est aussi une réussite car ils ont su trouver une manière de non seulement donner mais de recevoir. C’est-à-dire que les migrants sont accueillis mais ils participent en retour à toutes les actions menées par la mairie. Pour reconstruire le village et developper un tas d’autres actions qui vont du soutien aux personnes âgées à des ateliers de tissage, de chocolat, de vannerie, etc.

S-A : Ce modèle a surtout pour but de travailler ensemble en vue de redonner vie au village. C’est vraiment du donnant-donnant. Le mot intégration n’est pas utilisé à Riace. Ils ne se posent pas la question comme ça.

Pourquoi sont-ils particulièrement accueillants à Riace ?

S-A : Il y a plusieurs raisons. Il y a la nature même de Riace. Ce village a été envahi par les Turcs il y a fort longtemps, puis les Grecs sont venus. Il y a beaucoup de gens venus de la mer. Donc les Riacese sont conscients d’être certainement issus de populations différentes. Ensuite, c’est une donnée, l’hospitalité du sud de l’Italie est connue, elle n’existe pas qu’à Riace. Et puis, il y a la mémoire de leur propre exile. Rappelons que les trois-quarts du village sont partis entre les années 1930 et 1950. Donc ils savent ce que c’est de partir et de ne pas revenir.

Pensez-vous que ce modèle soit reproductible ?

S-A : Ce qui est reproductible à l'infini, c’est le regard que ces gens portent sur les nouveau arrivants. Et comme eux, nous devrions tous nous poser cette question : que peuvent nous apporter ces nouveaux arrivants ? Au lieu de nous demander que vont-ils nous coûter ou nous enlever.

Dans le film, vous superposez deux histoires de migrations : celle de ceux qui arrivent et celle de ceux qui sont partis de Riace. Pourquoi  ?

S-A : C’est une façon de dire que le destin des hommes est de partir quand ils ne peuvent plus ou ne veulent plus vivre quelque part. Aller vivre ailleurs est un droit. Nous voulions montrer à ceux qui verront ce film que l’on est tous, quelque part, des enfants d’immigrés. Il ne faut pas l’oublier aujourd'hui !

Quelle est la situation actuelle du village ?

Riace commence a être très connu. Il subit donc une pression forte des autorités pour accueillir les nouveaux migrants. La difficulté est d’essayer de garder un équilibre et un accueil digne. Mais la bonne nouvelle, c'est que beaucoup de villages autour de Riace sont en train de prendre exemple sur lui.  

Pour voir la bande-annonce de "Un Paese di Calabria", c'est par ici  

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