Canicule, les sans-abri en meurent plus que du froid

Publié le 21 juin 2017 (modifié le 20 février 2023 à 22h15)
Par Samu Social de Paris
Temps de lecture : 3 mins

Depuis mardi, 66 départements sont placés en vigilance orange à la canicule selon Météo France. Pendant ces périodes de fortes chaleurs, les personnes sans-abri sont en première ligne et font partie des personnes les plus vulnérables. Que faire pour les aider ? One Heart a interviewé Dr Abdon Goudjo, directeur du Pôle médical et soins au Samu social de Paris

One Heart : Est-il vrai que les personnes sans-abri meurent autant l'été que l'hiver ? 

Dr Abdon Goudjo : Oui, autant sinon plus. En hiver, il y a le plan grand froid, un plan très structuré qui permet de mettre à l'abri la plupart des personnes sans-domicile. Alors  qu'en été, il n'y a pas de lieu d'accueil de nuit. Beaucoup de services ferment en raison des vacances. Autre élément qui n'arrange pas la situation : l'alcool, car elle déshydrate. Si, en plus, les personnes exposées à la chaleur ne peuvent pas se mettre à l'abri, cela devient très difficile.

J'ai d'ailleurs relevé ce problème début juin, lors de la réunion avec la Direction générale de la santé, en présence de madame la ministre de la Santé Agnès Buzyn, pour préparer le plan canicule. La mise à l'abri des personnes sans-domicile-fixe est très difficile dans la mesure où il n'y a pas de lieux accessibles pour eux. Ils sont soumis à une barrière invisible. Soit ils n'osent pas rentrer dans un lieu qu'ils jugent trop chic, comme les cinémas et les théâtres ; soit ils ne sont pas autorisés à entrer. C'est le cas dans les grandes surfaces, par exemple.

Que propose le Samu social pour les aider ? 

Nous avons mis en place un dispositif qui permet de les mettre à l'abri si possible, ou du moins de veiller sur eux et de leur apporter régulièrement des moyens de s'hydrater. Nous n'accentuons pas nos maraudes, mais nous sommes plus vigilants. Notamment concernant les médicaments. Je demande à mes équipes de faire attention aux personnes qui prennent des neuroleptiques et diurétiques, lesquels peuvent entraîner des déshydratations. 

Par ailleurs, nous avons ouvert notre Espace solidarité insertion, appellé aussi ESI, porte de Vincennes [ La Maison dans le Jardin , située à l’hospice Saint-Michel (Paris XII). NDLR]. Au lieu de n'être ouvert que l'après-midi, il est accessible de 10 h à 17 h, du lundi au vendredi, pour proposer aux personnes sans-abri un espace pour s'hydrater avec des brumisateurs, des apports d'eau, un jet d'eau dans la cour, sous les arbres,... Ils ont aussi accès à un espace d'hygiène et à une consultation médicales s'ils le souhaitent.

Les villes ont-elles des moyens d'agir ? 

Oui, en mettant en place des lieux où les personnes sans-abri peuvent se réfrigérer, sans avoir à demander la permission. Il n'y aurait alors pas ce problème de barrière invisible. Bordeaux, par exemple, a trouvé la solution. La Ville a installé un miroir d'eau ouvert à tous. 

Et le citoyen lambda, que peut-il faire face à une personne sans-abri qui souffre de la chaleur ?

Il y a deux choses. Si la personne souffre de la chaleur, c'est que le cap de prévention a été passé. Il faut appeler les secours [le 115 pour le Samu Social, le 18 pour les pompiers, le 15 pour le Samu, le 112 pour toutes urgences NDLR]. On met d'abord la personne à l'abri. On lui donne à boire si elle est encore consciente ; sinon, on la met en position latérale de sécurité. Puis, tout de suite, on alerte. Seul le service dédié peut prendre en charge correctement la personne.

En amont, il s'agit d'être vigilant comme avec tout être humain vulnérable. Rien ne coûte de donner une bouteille d'eau à une personne assise sur un trottoir. Et on lui parle. On n'apporte pas son aide sans parler. On est des humains. On demande à la personne si elle a bu, si elle veut boire. Cela va permettre de susciter l'envie de boire. Car il n'est pas naturel de boire quand on n'est pas en phase de déshydration.

Je n'ai pas trop d'inquiétude pour les sans-abri postés près d'une grande surface. Ils finissent toujours par avoir une aide. Ils ont encore un réflexe de survie. Ce n'est pas le cas des personnes isolées, celles qui vivent dans les halls de gare ou encore dans les bois. J'ai plutôt peur pour eux. 

 

Outre le Samu social, d'autres acteurs se mobilisent pour les personnes sans-abri en période de canicule. Le Carillon a répertorié, sur une carte en ligne , les commerçants solidaires parisiens qui donnent de l'eau et abritent au frais. L'association Entourage a publié un article très complet sur les moyens d'aider les sans-abris en cas de grandes chaleurs.. Vous pouvez aussi télécharger l'appli Entourage . Celle-ci vous permet d'être au courant des besoins des personnes à la rue et vous aide à agir à votre niveau. 

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Samu Social de Paris

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Le Samusocial est une approche professionnelle de lutte contre la grande exclusion. Elle vise à apporter à tout moment, de jour comme de nuit, une assistance aux personnes sans domicile fixe et à rechercher la réponse la plus adaptée au besoin qu’elles expriment. La méthode consiste à aller vers les personnes, à offrir une permanence 24h/24, à rechercher des solutions d’hébergement d’urgence et à favoriser la sortie d’urgence en lien avec les partenaires de l’insertion. Elle laisse toutefois les personnes libres de leurs décisions.

Inaugurée par le Samusocial de Paris, cette approche a été reprise dans toute la France, et a aussi participé à la naissance du Samusocial International, une organisation non gouvernementale qui déploie aujourd’hui ses activités dans le monde entier.


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