Bordeaux : elle ouvre un centre de soins pour les victimes de mutilations sexuelles

Publié le 9 septembre 2020 (modifié le 20 février 2023 à 22h18)
Par One Heart
Temps de lecture : 3 mins

L’institut des Orchidées rouges, un nouveau centre d’accompagnement pour les femmes victimes de mutilations sexuelles, a ouvert ses portes lundi 7 septembre à Bordeaux. À l’origine du projet, Marie-Claire Kakpotia Moraldo, une Ivoirienne excisée de force à l’âge de 9 ans, qui espère chaque année pouvoir aider 300 femmes victimes de mutilations sexuelles.

 

Marie-Claire Moraldo, elle-même victime de mutilations génitales


À l’âge de 9 ans, Marie-Claire Kakpotia Moraldo passait ses vacances avec la famille de son père dans son pays natal, la Côte d’Ivoire. Un jour, une de ses tantes l’emmène avec sa cousine à ce qui devait être une "fête" : « Il y avait plusieurs filles comme moi, dont ma cousine. A tour de rôle, elles allaient dans la pièce qui servait de douche. Mon tour est venu. Elles étaient quatre à l’intérieur. Elles m’ont planquée au sol, elles m’ont tenu les bras et les chevilles et la quatrième avait un couteau. Ça a été très rapide, à peine le temps de réaliser. » Cette mutilation génitale marquera la jeune femme pendant de nombreuses années jusqu’à un déclic, qu’elle aura suite à une rencontre amoureuse. 


À 34 ans, Marie-Claire décide enfin de se tourner vers une chirurgie réparatrice mais ne trouvant rien sur Bordeaux, elle doit se rendre à Paris. Cette chirurgie la sauvera de son traumatisme : « Je me suis fait opérer le 7 décembre 2016 et c’est ma deuxième date de naissance, je suis enfin devenue entière » explique-t-elle. Trois mois après sa "seconde naissance", Marie-Claire crée, à Bordeaux, la première association de lutte contre l'excision, le mariage précoce ou forcé : "les Orchidées rouges". Ce nom lui tenait particulièrement à coeur car il désigne une fleur que l’on coupe et qui repousse plus belle, pour rappeler son opération salvatrice. Pendant trois ans, l’association restera sans local mais recevra 128 femmes envoyées majoritairement par des professionnels de santé ou d’autres associations et en aidera régulièrement pas moins de 90.

 

Un accompagnement physique et psychologique 

 

Selon les derniers chiffres, près de 125 000 femmes victimes de mutilations sexuelles vivraient en France, dont plusieurs milliers en région Nouvelle-Aquitaine. Pour pallier le manque de structures d’accompagnement et aider ces femmes, Marie-Claire a décidé d’ouvrir un centre d’accueil dans le quartier Saint-Serin à Bordeaux. Grâce aux subventions de la région, de la ville, du département mais surtout grâce au mécénat, l’institut des Orchidées rouges -du même nom que l'association- a enfin pu ouvrir ses portes le 7 septembre dernier.

 

Photo de l'intérieur du centre. ©EB/Rue89 Bordeaux

 


L’institut propose un accompagnement complet (physique, psychologique et judiciaire) et gratuit pour les femmes victimes d’excision. Pour cela, la structure mobilise une équipe pluridisciplinaire de psychologues, gynécologues, sexologues, juristes, avocats, travailleurs sociaux, professionnels du bien-être et de l'estime de soi. L’accompagnement se fait en plusieurs étapes et commence par une prise de rendez-vous au sein de la structure. Cette première entrevue se fait avec une infirmière, référente d’accueil, chargée de recueillir les histoires des femmes. Ces dernières bénéficient ensuite d’une consultation avec un gynécologue qui diagnostique le type d’excision elles ont subi et préconise éventuellement une chirurgie. Cette chirurgie réparatrice n’est pas du tout obligatoire « mais elle vient en complément d’une reconstruction psychologique » explique Marie-Claire. Un parcours est ensuite proposé par l’équipe pluridisciplinaire aux femmes, qui le valide si elles sont d’accord. Ce parcours reste ensuite toujours modulable en fonction des envies des femmes. 


En dehors du centre, l’association des Orchidées rouges organise également des actions de prévention contre les mutilations sexuelles dans des quartiers comme les Capucins, les Aubiers, le Grand Parc : « des lieux bien spécifiques où nous rencontrons un public directement concerné par ces problématiques » précise Marie-Claire. 

 


Par Chloé Sappia

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