Cette start-up a trouvé une solution pour réduire la pollution des avions

Publié le 2 juillet 2021 (modifié le 20 février 2023 à 22h20)
Par One Heart
Temps de lecture : 4 mins

Comment réduire la consommation de carburant des avions ? Question vaste et complexe à laquelle Pierre Jouniaux a trouvé une réponse en étudiant les boites noires des avions. Il a réussi, en s’appuyant sur l’intelligence artificielle, à développer un service pour optimiser les trajectoires des vols et limiter la consommation de carburant des avions. Il nous explique comment fonctionne Safety Line, une sorte de « Waze Green » pour les pilotes de ligne dans le but de réduire les émissions carbones des avions.

 

L’intelligence artificielle au service de l’environnement  

Ingénieur, Pierre Jouniaux a travaillé au Bureau d’Enquêtes et d’Analyses (BEA) du Ministère des transports pendant 12 ans et a été pilote de ligne. Il a étudié de nombreuses boites noires, dont celle tristement connue du crash du Concorde en juillet 2000. Au fur et à mesure de sa carrière, il a constaté que de nombreux points pouvaient être améliorés sur l'optimisation des vols pour consommer moins de carburant. La compagnie aérienne se fixe comme objectif premier de transporter des voyageurs ou des marchandises d’un point A à un point B, le plus rapidement et le plus sûrement possible. 

Le pilote fait ainsi des manoeuvres presque par automatisme, les trajets sont formatés. L’oeil d’ingénieur aéronautique de Pierre lui permet d’observer différemment le rôle du pilote lors de ses deux années aux commandes d’avions. Ils comprend qu’à différents niveaux, des solutions sont possibles pour optimiser les trajectoires, et faire baisser la facture de carburant, le poste le plus important des coûts dans une compagnie aérienne. Pierre va se servir de l'intelligence artificielle pour aller sur la voie de la décarbonation des compagnies aériennes. Il s’entoure pour cela, d'une equipe consituée aujourd'hui de 35 personnes.

La bascule de Safety Line s’est faite de manière concrète en 2016, avec Transavia, son premier client, avec qui Pierre a développé un partenariat de co-innovation. Ils sont ensemble passés de la recherche à la pratique. Grâce à Safety Line, la compagnie aérienne low cost d’Air France économise entre 2 et 5 % de carburant, soit un avion de sa flotte (de 40 avions) qui volerait sans carburant. Comme l'explique Pierre Jouniaux au micro de BFM Business, Transavia a ainsi pu économiser 84 tonnes de carburant en un, ce qui équivaut à peu près à 250 tonnes d'émissions de CO2.

 

optiflight, safety line

OptiFlight intégré dans l’application météo utilisée par les pilotes de Transavia ©Safety Line

 

Des solutions simples pour réduire la consommation de carburant des avions


La solution développée par Safety Line, baptisée OptiFlight, est labellisée depuis 2020 par la Fondation Solar Impulse. Elle étudie tout le champ des possibles sur l'ensemble du parcours de l’avion afin d’optimiser sa trajectoire, notamment sur la phase de la montée (celle qui succède au décollage). La vitesse est ainsi régulée en fonction de la pression, des vents, des températures mais aussi de la masse et du poids de l’avion (plus ou moins chargé). OptiFlight joue ensuite sur le vol avec des changements de vitesse, d’altitude, de cap (de route) pendant le vol. Ces préconisations se basent en partie sur l’apprentissage, c’est-à dire sur les trajectoires effectuées par les autres avions. C’est ainsi que le système s’améliore encore plus avec le temps, grâce aux nouvelles données et expériences qui viennent constamment enrichir les modèles.

Tous ces calculs se font au sol, avant le départ car seuls des ordinateurs très puissants -qu’on ne pourrait trouver à bord- peuvent effectuer de telles analyses. Soyons rassurés, ces changements d’altitude et de route ne présentent aucun risque pour les autres avions : tout se fait dans un cadre tout à fait normé en prenant en compte les trajectoires des uns et des autres. Aujourd’hui Safety Line travaille avec Air France mais aussi Air Asia (le plus gros low cost d’Asie du Sud Est), des compagnies mexicaines et chiliennes mais aussi avec les lignes cargos de DHL et Lufthansa. Pierre a aussi l’ambition de réduire la consommation de carburant des avions au sol car sur le tarmac, la consommation des avions est aussi très élevée : 5 % du carburant est consommé avant et après le décollage. La start-up a initié un projet spécifique sur ce sujet avec le Groupe ADP à Roissy-Charles de Gaulle.  

Mais Pierre est optimiste et réaliste : « Il n’y a pas de raison pour que tout le monde n’utilise pas notre solution, le système se finance tout seul puisque les économies sur le carburant, le plus gros poste de dépenses pour une compagnie aérienne, sont considérables » . Sa seule difficulté : convaincre et surmonter la prudence du secteur, assis sur des habitudes vieilles de plusieurs années.

 

Par Anne-Sophie de Monès

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